Protocole de Kyoto : le rôle des pays en développement

Op-ed - Oct. 14, 2006 - By Matthew Bramley

Published in La Presse (Oct. 14, 2006)

S'il y un grand problème d'actualité dont la solution doit être impérativement planétaire, c'est celui des changements climatiques. Une tonne de gaz carbonique qui sort d'une cheminée à Beijing a exactement le même effet néfaste qu'une tonne émanant d'un embouteillage à Montréal. C'est que les gaz à effet de serre (GES) perdurent assez longtemps pour se répandre partout de façon égale.

En d'autres termes, réduire les émissions de GES en Chine contribue tout autant à prévenir les changements climatiques au Canada que de les réduire ici-même.

Que c'est donc décourageant d'entendre notre ministre fédérale de l'Environnement, Rona Ambrose, fustiger l'idée de financer des projets de réduction de GES dans les pays en développement! C'est ce qu'elle a fait récemment devant le comité de l'environnement de la Chambre des communes. «Corruption», «manque d'imputabilité», toutes les critiques lui semblaient bonnes lorsqu'il était question d'intégrer un volet international au plan canadien de réduction des GES.

Pourquoi cette question est-elle particulièrement importante aujourd'hui? C'est que le Canada a tellement tardé a réduire les GES qu'il ne nous reste plus assez de temps pour respecter nos obligations internationales en misant seulement sur la réduction d'émissions au pays. Afin d'atteindre notre objectif de Kyoto, nous aurions besoin d'investir des sommes considérables à l'étranger. Cela fonctionnerait par l'achat de «crédits», chaque crédit représentant la réduction d'une tonne de GES à travers un projet bien identifiable soit dans un pays en développement, soit dans un pays de l'Europe de l'est.

Les organismes environnementaux auraient préféré voir nos gouvernements faire preuve de plus de vision au lendemain de la conférence de Kyoto en 1997 - et prendre à ce moment-là les mesures qui s'imposaient pour réduire les GES au Canada. Cela aurait permis de lancer plus tôt la transformation inévitable du Canada vers une économie «décarbonisée». Et en consommant moins de combustibles fossiles, on aurait réduit à la fois les GES et les polluants à l'origine du smog.

Mais cela n'a pas été fait, et nous devons maintenant nous intéresser de près au mécanismes internationaux prévus par Kyoto. On y découvre des aspects extrêmement positifs.

Le mécanisme principal s'appelle «mécanisme pour un développement propre» (MDP) et s'applique aux pays en développement. Quelques 350 projets ont été enregistrés à ce jour, et on estime que 12 milliards $ (US) seront investis dans de tels projets d'ici 2012. Les principaux investisseurs sont des entreprises japonaises et européennes, ainsi que plusieurs gouvernements européens.

Le MDP n'est pas sans problèmes : les bénéfices environnementaux de certains projets sont discutables. Mais puisque tous les documents décrivant les projets peuvent être consultés sur Internet, les problèmes sont faciles à identifier. L'imputabilité de ce mécanisme est exemplaire.

Mme Ambrose a déclaré que «la meilleure façon de participer à l'amélioration de l'environnement planétaire consiste à mettre au point, puis à mettre en oeuvre des technologies propres dans les pays qui sont en fait les plus importants producteurs d'émissions de GES, c'est-à-dire les États-Unis, la Chine et l'Inde».

Dans le cas de la Chine et l'Inde, c'est exactement ce que fait le MDP! Qu'est ce qu'elle attend pour y mettre de l'argent?

La première phase du Protocole de Kyoto, qui prendra fin en 2012, n'est qu'un premier pas. Seuls les pays industrialisés ont consenti à des objectifs contraignants, tandis que les pays en développement participent à travers le MDP. Mais pour la deuxième phase, il sera d'essentiel de convaincre les grands émetteurs parmi les pays en développement d'approfondir leur participation. Sinon, on ne pourra pas réduire suffisamment les émissions pour éviter des impacts catastrophiques.

Notre ministre de l'Environnement est même allée jusqu'à dire que «des pays tels que la Chine et l'Inde doivent s'engager à réduire leurs émissions polluantes et leurs émissions de gaz à effet de serre».

Si ce voeu est sincère, comment peut-on espérer qu'il soit réalisé en opposant un «non» cinglant à l'idée d'aider ces pays à commencer le travail?


Matthew Bramley
Matthew Bramley

Matthew Bramley was with the Pembina Institute from 2000 to 2011, serving as director of the climate change program and director of research.


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